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L'«Huma» et le policier Hiblot

 

 

(Commentaire d'un article de l'Humanité concernant l'acquittement du policier Hiblot.)

TEXTE DE L'HUMANITE

Oui, le policier Hiblot a bien tué d'une balle dans la nuque un jeune homme qui avait forcé un barrage au volant d'une voiture volée. Non, le policier Hiblot, quoique choqué par la mort de sa collègue quelques minutes auparavant (pour laquelle le jeune meurtrier a été condamné à dix ans de réclusion criminelle), n'était pas en état de légitime défense, la seule raison légale qui permet d'éviter une condamnation. L'audience l'a démontré.

C'est dire combien le jugement d'acquittement pur et simple, prononcé vendredi par la cour d'assises de Versailles, est éloigné de la justice et combien il peut éloigner de la justice. Ce verdict apparaît comme un permis de tuer donné aux policiers et comme une gifle flanquée à des dizaines de milliers de jeunes de banlieue. Comment les institutions peuvent-elles être crédibles lorsqu'elles martèlent - à juste titre - l'exigence du respect de la loi mais qu'à l'heure du jugement, la balance est aussi outrageusement faussée ?

Vendredi noir que celui de la cour d'assises de Versailles. Susceptible d'alimenter les violences qui éclatent régulièrement lorsque la mort d'un jeune semble s'accompagner de l'impunité pour ceux qui l'ont tué. Menaçant également d'alimenter le discours incendiaire de ceux qui veulent attiser la détresse des grandes cités. Justice n'a pas été rendue.

FIN DU TEXTE DE L'HUMANITE

Première remarque : le journaliste Machinowski, qui parle véritablement en maître, en semblant ne pas encore bien se rendre compte que même des français peuvent tomber sur ses écrits, se permet de critiquer une décision de justice irrévocable en termes particulièrement violents, comportant des accusations gravissimes.

Comme nous n'avons pas entendu d'un procès qui aurait été fait à "l'Huma" à la suite de ces allégations, nous pouvons en déduire que dorénavant, il est permis de critiquer ouvertement et publiquement les décisions de justice rendues en dernier ressort. Même Maître Vergès, quand il a évoqué l'affaire Raddad à France-Inter juste après les résultats accablants de l'analyse d'ADN de la plus célèbre inscription du monde, ne s'est pas permis cela : il avait rappelé que s'il se permettait de mettre en cause sans précautions les décisions rendues jusqu'ici dans l'affaire, le Parquet le poursuivrait aussitôt. Mais le Parquet ne poursuit pas "l'Huma". Donc les craintes de Maître Vergès sont obsolètes. Sinon, il faudrait qu'on nous explique pourquoi et sur quels critères le droit de contester sévèrement les décisions de justice n'est donné qu'à certains.

Deuxième remarque : le membre de phrase "a bien tué d'une balle dans la nuque" mérite à lui tout seul la palme de la plus putréfiée obscénité marxiste. Le lecteur distrait qui lit ça peut très bien imaginer le policier Hiblot en train de loger froidement une balle dans la nuque à un pauvre type qu'il a forcé à s'agenouiller... ou qu'il tient solidement à l'aide de menottes, au fond de quelque couloir souterrain plongé dans la pénombre, en le faisant marcher devant lui.

Ainsi, notre lecteur distrait, s'il n'y prend garde, peut faire l'AMALGAME entre le geste du policier Hiblot et celui des Talibans qui exécutent tous les jours de pauvres femmes voilées, mises à genoux, dans les stades de Kaboul, ou celui du guépéouiste qui exécute le condamné, à la fin du procès d'autocritique, dans les caves de la Loubianka.

Chapeau, Machinowski ! Quel coup dur ce dut être pour vous, la chute du mur ! Car vous étiez promis à un avenir extraordinaire ! Réussir, en neuf mots, à faire retomber sur vos ennemis (donc vos victimes habituelles) les exacts crimes dont le communisme, que vous servez avec dévotion, s'est rendu coupable partout où il a sévi ! Ah ! vraiment, ça il fallait le faire ! et vous l'avez fait !

On comprend que vous vous soyez rabattu sur la France ! Confronté à cet écroulement subit de tous vos espoirs, vous avez cherché, sur une mappemonde, "le soir, à la clarté des lampes", où vous pourriez vous refaire une vie digne de vos si exceptionnelles compétences, et vous avez choisi la France ! Quel choix judicieux ! C'est là, en effet, que se réfugient les derniers marxistes de haut vol, comme les derniers nazis de haut vol se réfugiaient dans certains pays d'Amérique du Sud ou du Moyen-Orient...

Exégèse proprement dite :

a) Décortiquons un peu la phrase suivante :"Non, le policier Hiblot, quoique choqué par la mort de sa collègue quelques minutes auparavant (pour laquelle le jeune meurtrier a été condamné à dix ans de réclusion criminelle), n'était pas en état de légitime défense, la seule raison légale qui permet d'éviter une condamnation. L'audience l'a démontré."

Alors là, accrochez-vous bien ! C'est du grand art !

N'allez pas croire, vous qui me lisez, que vous pourriez écrire un tel chef-d'oeuvre comme ça, en improvisant, au fil de la plume... Il faut des années et des années d'entraînement, de cours du soir marxistes, de stages de formation de cadres du Parti, d'apprentissage studieux dans des rubriques mineures et ingrates de sous-journal communiste de cellule locale d'une banlieue rouge de bout du monde, avant de parvenir à une telle virtuosité dans l'ignoble, à une telle aisance dans l'abject, à une telle agilité pour slalomer dans les déjections.

La somme de travail que cela implique dépasse l'entendement et mérite à coup sûr un salaire hors du commun. Enfoncé, Aragon, avec ses eaux de rose pour petits besogneux enfants de Thorez ! Ah ! je vous concède, Machinowski, que votre maîtrise de la langue française, pourtant si commune en Europe orientale et slave, le dispute à celle de nos meilleurs écrivains !

Le policier Hiblot est dépeint comme "choqué". En bon français, on est choqué par une INFORMATION qui vous touche indirectement et non par un événement qui vous atteint directement. Le français moyen, qui lit peu et se cultive encore moins, est néanmoins gouverné à son insu par le vrai sens des mots, parce que les personnes qui s'adressent à lui connaissent nécessairement un peu mieux que la moyenne le bon usage des mots et un minimum de syntaxe (sinon ces personnes n'auraient pas été choisies pour s'adresser aux autres) ; donc le français moyen qui ne lit pas et qui est inculte lit ou écoute des gens qui lui parlent tout de même en un français pas trop mauvais et parfois même assez bon.

Ce français moyen, donc, n'a jamais vu le mot "choqué" appliqué à une victime directe : a-t-on vu écrit, même dans France-Dimanche, que Corinne Caillaux aurait été "choquée" par ce que lui a fait l'ordure ? Non, bien sûr ! En revanche, ses parents, eux, ont été "choqués" (et ne s'en sont pas remis, et ne s'en remettront jamais jusqu'à leur mort...).

Donc l'emploi du mot "choqué" n'est pas une erreur, c'est le début d'une manoeuvre subliminale savante, qui fait naître dans l'esprit du lecteur l'idée confuse sous-jacente d'un policier Hiblot qui aurait été EXTERIEUR à la scène (puisqu'il n'aurait été que "choqué" par la "mort" de sa collègue) ; ce qui rend le lecteur réceptif (toujours à son insu) à l'idée que le policier Hiblot va bientôt tuer froidement le "jeune" "d'une balle dans la nuque".

Admirez comment tout va se jouer dans l'inconscient du pauvre lecteur de "L'Huma" ! aux cours de formation des cadres du Parti, on a aussi parfaitement compris tous les services que pouvait rendre le bon docteur Freud à la cause sacrée du prolétariat... non pas la "Tramdeutung", non, ça c'est pour les rombières désoeuvrées de Vienne qui cherchaient à rationaliser leur envie tyrannisante de pomper leur valet... Mais ce qu'il y a de hautement sérieux et scientifique dans Freud : "l'essai sur la signification du langage" !

Continuons : "... choqué par la mort de sa collègue quelques minutes auparavant". Cherchez bien : vous ne trouverez pas ! Vous ne trouverez jamais, ni là ni dans la suite du texte, la réponse aux questions élémentaires que tout un chacun se pose quand on lui jette à la face la mort de quelqu'un d'autre : où est morte sa collègue ? comment ? pourquoi ? quand exactement ? "quelques minutes auparavant"... ah bon ! ça aurait pu être tout aussi bien en Australie... par radio, oui c'est ça, par la radio, en écoutant RTL ou France Interethnique, le policier Hiblot, quelques minutes auparavant, venait d'apprendre la mort de sa collègue entre deux pronostics pour le prochain tiercé d'Auteuil, et ça l'avait choqué, le pauvre !

Observez comme ici, le mot "choqué", sans crier gare alors qu'on le croyait anodin et oublié, chemine dans l'inconscient, par une autre voie, en suggérant l'idée d'un policier au psychisme faible, incapable d'encaisser avec fermeté d'âme le "choc" provoqué par l'information de la mort de sa collègue. On conçoit qu'une telle fragilité psychique va amener Hiblot à céder, dans un instant, à sa pulsion meurtrière. Certes, l'exercice est difficile : il s'agit d'imposer chez le lecteur de "L'Huma" à la fois deux idées en apparence contradictoires : celle d'un policier Hiblot qui tue froidement un "jeune" d'une balle dans la nuque, et celle d'une fragilité psychique expliquant pourquoi Hiblot a cédé à ses pulsions meurtrières.

L'exercice est difficile, mais Machinowski le réussit impeccablement. Le mot "choqué" remplit les deux fonctions à la fois : une première fois, en suggérant l'idée que Hiblot est extérieur à la scène, donc va tuer froidement; et une deuxième fois, en suggérant que c'est le choc provoqué en apprenant la mort de sa collègue qui va déclencher la pulsion meurtrière chez Hiblot, parce qu'il est psychiquement fragile et au fond, n'était pas fait pour être policier, n'est-ce pas, Machinowski ? et même une troisième fois, car voilà que se pointe une troisième idée : celle d'un policier Hiblot fasciste et raciste. En effet, c'est le choc provoqué par l'information que sa collègue est morte quelques minutes auparavant qui déclenche chez Hiblot le processus du meurtre, en activant ses pulsions ; donc, nous allons enfin connaître les pulsions inavouables qui gisent au fond de l'âme noire du policier Hiblot...

Ça y est, vous êtes prêts ? Oh ! le vilain ! Ce sont des pulsions fascistes et racistes, voyons ! Il y en a d'autres, à la place de Hiblot, qui auraient eu, dans la même circonstance, des pulsions avouables, citoyennes, antiracistes, vertueuses; qui auraient demandé au fuyard, par exemple : "S'il vous plaît, voulez-vous revenir ? Je voudrais vous poser quelques questions ! Je vous promets de ne pas vous en poser une seule avant que votre avocat soit arrivé ! Je suis un policier citoyen, moi, rassurez-vous, je ne fais aucun amalgame entre la mort de ma collègue survenue il y a quelques minutes et votre cas personnel ! Je vous promets d'inviter le président de sos-racisme et celui du MRAP ensemble à votre interrogatoire, et je vous promets que vous resterez libre, car jusqu'à présent, je n'ai rien à vous reprocher qui puisse justifier votre rétention ! Je vous demande juste de vouloir bien avoir l'obligeance de m'aider dans ma mission, car j'ai pensé que votre témoignage pourrait être important et aider à la manifestation de la vérité".

Voilà ce qu'un vrai policier doit être capable, en pareil cas, de dire d'un seul souffle, en quelques dixièmes de seconde, au pauvre "jeune homme" qui s'enfuit, si attendrissant de frayeur ! Tandis que cet odieux Hiblot, lui, s'apprête à tuer froidement ce pauvre jeune homme "d'une balle dans la nuque" !

La cause est entendue : ce Hiblot n'est qu'un fasciste et un raciste, c'est lui le criminel dans l'affaire ! C'est-y pas beau, ça ? Nous ne sommes pas encore à la moitié du texte, et considérez ce qui a déjà été inculqué, en cachette, au pauvre lecteur de "L'Huma" sans méfiance, au sujet de Hiblot : c'est fou ! Nous savons déjà qu'il était extérieur à la scène, qu'il est psychologiquement fragile puisqu'il ne supporte pas l'information que sa collègue vient de mourir quelques minutes auparavant, et qu'il est mu, au fond de lui-même, par des pulsions fascistes et racistes. Et nous comprenons maintenant, ça crève les yeux, pourquoi ce Hiblot a "tué le jeune homme d'une balle dans la nuque". Tout colle !

Le texte n'est pas fini, mais s'il fallait l'arrêter là, ce ne serait pas bien grave : un bon marxiste doit apprendre à prévenir toute censure. L'essentiel est dit ; Et si bien dit qu'à partir de maintenant, Machinowski va se payer le luxe de procéder par déduction : excellent, ça ! ça donne au lecteur le sentiment qu'il est intelligent... Ah ! Machinowski, qu'il se dit, le lecteur, pas la peine de continuer, j'ai tout compris maintenant ! Ah le salaud ! La fétide pourriture faisandée de flicaille bourgeoise ! L'immonde valet des vampires capitalistes pompeurs d'entrailles ! Si on l'avait sous la main, pas vrai, Machinowski, on lui apprendrait un peu les bonnes manières prolétariennes, à ce porc !

Ne riez pas ! Ce que vous venez de lire là, c'est la dissection du procédé par lequel la logomachie marxiste a formé, depuis bientôt un siècle, les dizaines de milliers de procureurs, tortionnaires et assassins directement responsables des cent millions de morts : on leur inculque le sentiment qu'ils sont intelligents, on leur donne des victimes toutes désignées, et ce sentiment d'avoir tout compris les fait tellement jubiler que le vieil archétype du massacre rédempteur peut se libérer sans contrainte ! Le marxisme tel qu'il est et tel qu'il fonctionne, cher lecteur ! Comme si vous y étiez, entrez ! entrez ! spectacle gratuit ! Vous ne paierez la vraie note que bien plus tard ! (au goulag... )

Dites-vous bien qu'au point du texte de Machinowski où nous sommes déjà arrivés, tous ses lecteurs de "L'Huma" prisonniers de la démagogie marxiste sont déjà des procureurs en puissance prêts à accabler Hiblot, prêts à trouver que Machinowski commence à les lanterner, peu envieux de lire la suite de son article dans le détail...

b) Mais poursuivons quand même : "...(pour laquelle le jeune meurtrier a été condamné à dix ans de réclusion criminelle)". La démonstration magistrale continue : qui est "le jeune meurtrier" ? mystère... et meurtrier de qui ? on ne sait. Ah si ! de la collègue, pardi ! que j'étais bête ! il est vrai qu'avec cette parenthèse, je ne sais plus très bien où j'en suis, moi (très important, la parenthèse : ça place l'esprit du lecteur dans l'environnement d'une idée secondaire, une incidente en somme, peu ou pas rattachée au sujet principal). "a été condamné à dix ans de réclusion criminelle". Ah ? Et quand, cette condamnation ? Ce n'est plus de la virtuosité, ici c'est carrément du funambulisme sans filet ! Voyons, voyons, récapitulons, je m'y perds : la collègue est morte quelques minutes auparavant, mais le jeune meurtrier, qui doit être le sien si j'ai bien compris, a déjà été condamné à dix ans ? Non, ça ne doit pas être ça, j'ai dû mal comprendre. Peut-être y a-t-il un autre meurtre dans l'histoire ? Mais non, pourtant : "pour laquelle", quand même j'ai été à l'école républicaine, j'ai eu de bons maîtres d'une moralité au-dessus de tout éloge, qui n'ont jamais manqué une seule leçon de morale citoyenne, je leur fais confiance, j'étais bon en grammaire citoyenne, " laquelle" doit sûrement désigner "la mort de la collègue", donc il semblerait que cette condamnation soit celle du jeune meurtrier de la collègue.

Ils sont calés, ces mecs qui écrivent dans "L'Huma" , ouh là !... Là c'était difficile quand même, mais j'ai trouvé, pas mal ! Pourtant j'ai quitté l'école voilà déjà douze ans ! mais quelle concision dans la phrase, pour nous dire tout ça : que cette ordure de Hiblot, quelques minutes auparavant, il venait d'apprendre en écoutant la radio de son véhicule de service que sa collègue était morte (ce devait être une collègue d'une autre brigade, qu'il avait perdue de vue depuis quelque temps, se dit par-devers lui notre bon lecteur de "L'Huma"), et le speaker avait précisé que son jeune meurtrier avait quand même été condamné à dix ans fermes (donc la collègue était morte et avait un meurtrier, ce qui tendrait à prouver qu'elle est morte tuée par ce meurtrier...

Mais n'allons pas trop vite quand même ! Un meurtre peut être prémédité ou pas, il peut même être involontaire, sans doute que ce meurtre était involontaire, puisque Machinowski ne parle pas d'assassinat... Moi, j'ai pas besoin d'écouter un enregistrement de l'émission de radio qu'a entendue Hiblot, le compte-rendu de Machinowski est parfaitement clair et me suffit, il est résumé et objectif, ça suffit, non ?.

Et c'est ça qui lui a fait péter les plombs, à ce fumier ! Parce que c'était un fasciste raciste, alors en apprenant ça, il avait ce mec devant lui, un arabe, et il a pas résisté : il l'a tué comme ça, d'une balle dans la nuque. Dix ans, bien sûr, ça a dû lui paraître pas beaucoup pour le meurtre de sa collègue (pfffff... une fliquette comme lui), mais le meurtrier était "jeune", ce qui explique qu'on ne lui a mis que dix ans ! Normal, on ne peut tout de même pas accabler les jeunes, même s'ils ont fait des bêtises il faut leur laisser leur chance ! Et puis comme je disais plus haut, le meurtre peut avoir été involontaire, que dis-je, a sûrement été involontaire ! Ah! salaud de Hiblot, va !

Notez ici, cher lecteur, que Machinowski ne dit pas "dix ans de prison" mais "dix ans de réclusion criminelle". Ce n'est ni de la lourdeur de style ni de la distraction, c'est très étudié, au contraire ! La périphrase est là pour accentuer la sévérité de la condamnation : Machinowski est bien conscient que dix ans de prison pour l'assassinat d'une femme policier dans l'exercice de ses fonctions, c'est d'une clémence sidérante, que dans presque tous les pays du monde, ce type de crime est puni de mort ou de réclusion à perpétuité, et que donc l'impression produite sur le lecteur risque d'être terriblement négative ; d'autre part, il ne peut pas se permettre de passer ce verdict sous silence, car son journal doit donner l'illusion de l'objectivité et d'une information complète.

Alors, il donne l'information, ou plus exactement, il écrit quelque chose qui permettra à la rédaction de "L'Huma" d'affirmer, si besoin était, qu'elle n'a rien caché à ses lecteurs ; mais il se débrouille pour embrouiller l'information à plaisir (la "mort" de la collègue, suivie un peu plus loin, du bout des lèvres, comme à regret, d'une parenthèse miteuse et savamment abstruse où il est question d'un meurtrier qui a pris dix ans... mais dix ans de "réclusion criminelle", expression qui multiplie infiniment l'impression de sévérité de la peine (pourtant ridiculement insuffisante) : dix ans de prison, c'est en effet d'une clémence insultante pour la famille de la victime, tandis que "dix ans de réclusion criminelle", ça c'est beaucoup plus sévère, n'est-ce pas ? Surtout pour un meurtrier de "pour laquelle", car la phrase est tournée de manière que n'importe quel avocat puisse "démontrer" que "L'Huma" a donné toute l'information, mais que jamais, syntaxiquement, Le "meurtrier" n'est rapproché de la pauvre policière assassinée ! Le meurtrier n'est pas ce qu'il est objectivement (l'assassin de la policière), non, il est un meurtrier, comme ça, un meurtrier tout court, qui a prix dix ans de "réclusion criminelle" ... La phrase ne dit jamais explicitement qui le meurtrier a tué, non, elle dit qu'il a pris dix ans "pour laquelle" ... . Pour remonter du meurtrier à sa victime, il faut réussir un sacré parcours du combattant mental ! D'abord, lire toute la proposition subordonnée :sujet : le meurtrier ; verbe : expression verbiale "être condamné", construite avec l'auxiliaire "être" et le participe passé "condamné" ; ainsi, le meurtrier a été condamné ; condamné à quoi ? Tremblez, bonnes gens ! à dix ans de RECLUSION CRIMINELLE (on en a la chair de poule...), toute une phrase complément d'objet très indirect, à peine un accusatif, presque un datif ; puis un vrai datif qui oblige à revenir en arrière : il a été condamné "pour laquelle", le relatif "laquelle" désignant non pas encore la victime, ne rêvez pas, mais un concept général abstrait :"la mort" ; la mort de qui ou de quoi ? Ah ! enfin, nous y voici : la mort de la collègue de l'abominable Hiblot : génitif. La pauvre policière a dans cette remarquable construction ce statut de paria, ce minable strapontin : génitif d'un concept abstrait représenté par un relatif jouant le rôle de datif dans une phrase qui comportait un accusatif indirect principal, c'est-à-dire jouant un rôle de cinquième roue de la charrette ; et encore, le génitif en question n'est même pas la policière elle-même directement elle, avec son nom, son âge, ses états de service, sa situation de famille, non-non-non ! Le génitif désigne la pauvre fliquette par l'antonomase "sa collègue", qui place un écran de plus entre elle et le pauvre lecteur.

Vous vous rendez compte quand le lecteur moyen tombe là-dessus ? il lui faut phosphorer sérieux avant de réaliser que puisqu'il s'agissait de "sa collègue", c'est qu'elle était peut-être fliquette ! Quand on sait le niveau auquel nos reîtres socialistes ont ravalé notre enseignement, que même parmi ceux qui décrochent leur bachot (soit 80 % de la classe d'âge... . ), seule une infime minorité est capable d'analyser correctement la construction grammaticale d'un texte, on mesure le mal fou que s'est donné Machinowski pour embrouiller jusqu'au trognon le brav' lecteur de "L'Huma"... et l'on ne peut que rester interdit d'admiration devant sa prouesse !

Quand je vous disais que vous ne pourriez jamais en faire autant sans de longues années d'entraînement intensif ! La suite coule de source, Machinowski l'ôte littéralement de la bouche de ses chers lecteurs : "...n'était pas en état de légitime défense, la seule raison légale qui permet d'éviter une condamnation. L'audience l'a démontré." Ben oui, quoi, c'est exactement ce que je venais de conclure moi-même (se dit le cher lecteur de Machinowski). Tout ce qui précède le prouve : Hiblot n'était pas en état de légitime défense. Et Machinowski a raison de le rappeler : seule la légitime défense est légale pour éviter une condamnation. Attendez, je n'y suis plus tout d'un coup. "Pour éviter une condamnation". Condamnation de qui ? ah... ah! de Hiblot sans doute ; c'est ça : Hiblot voudrait éviter une condamnation, ce sale facho. Il aurait pu y couper (ça ne fait rien, on l'aurait eu la fois d'après) s'il avait été en état de légitime défense ; ça aurait été regrettable, mais ça aurait été légal (ici admirez le génie de ce choix du mot "légal", qui, dans le contexte, est extraordinairement lourd de suspicion : le brav' lecteur de "L'Huma" sait depuis longtemps à quoi s'en tenir sur le triste Hiblot, alors l'irruption du mot "légal" lui fait ici à peu près le même effet que quand il lit, dans les aventures d'Eliott Ness, que l'on n'a jamais réussi à trouver de motif "légal" pour arrêter Al Capone, que seul le fisc a réussi à le coincer...)

Bon, je reprends le monologue intérieur du brav' lecteur de "L'Huma". Mais il n'était pas en état de légitime défense, ce pourri ! Donc il ne pouvait pas éviter sa condamnation, c'est clair, non ? "L'audience l'a démontré". Ah ! en plus, l'audience l'a démontré, alors là, échec et mat mon vieux ! Tu vas pas t'en sortir ! (N. B. : sachez qu'en France, au pénal, les audiences ne "démontrent" rien. Il n'est même pas possible, dans l'écrasante majeure partie des cas, d'avoir un compte rendu INTEGRAL ET RIGOUREUSEMENT FIDELE des débats. Si bien que si un avocat vous injurie, par exemple, vous n'arriverez jamais à prouver qu'il vous a injurié, parce qu'il n'en reste AUCUNE TRACE. Des greffiers prennent des notes PARTIELLES ET RESUMEES, et encore A CONDITION QUE VOUS LE LEUR DEMANDIEZ AVEC INSISTANCE AVANT LE PROCES. Ils ne le feront d'ailleurs que de très mauvaise grâce, et vous serez très déçu du résultat, les trois quarts de vos souvenirs d'audience n'y figureront pas!)

c) Nous pouvons maintenant traiter d'un bloc l'envolée finale qui précède la conclusion : "C'est dire combien le jugement d'acquittement pur et simple, prononcé vendredi par la cour d'assises de Versailles, est éloigné de la justice et combien il peut éloigner de la justice. Ce verdict apparaît comme un permis de tuer donné aux policiers et comme une gifle flanquée à des dizaines de milliers de jeunes de banlieue. Comment les institutions peuvent-elles être crédibles lorsqu'elles martèlent - à juste titre - l'exigence du respect de la loi mais qu'à l'heure du jugement, la balance est aussi outrageusement faussée ?", conclusion dont l'orthodoxie marxiste est irréprochable de bout en bout, mais toutefois à condition que le texte qui le précède se soit bien infiltré dans l'inconscient du lecteur et y ait accompli son oeuvre. "acquittement pur et simple" : avec tout ce qu'on vient d'apprendre, ah ! saloperie de saloperie de justice bourgeoise ! pur et simple en plus ! non pas acquittement tout court, ce qui serait déjà abominable, mais acquittement pur et simple, même pas une petite remontrance : "on vous acquitte, mais la prochaine fois, hein, faites attention ! ne tuez pas comme ça, sinon on va se fâcher !" ; même pas ça, ils ont même pas cette décence ces sales bourgeois : acquitté, comme ça, pur et simple : "on vous acquitte". Ah ! vraiment cette société, on en veut plus, la lutte finale je vous dis ! aux lampions !

Le "C'est dire" est admirable, lui aussi : il souligne la méthode de déduction employée depuis le milieu du texte : l'horreur qu'on va éprouver de cet acquittement se déduit du début, d'où le "c'est dire". "... est éloigné de la justice et peut éloigner de la justice". Ici, Machinowski fait un peu sa coquette (sa seule faiblesse depuis le début, mais une faiblesse calculée, pour rappeler incidemment à son brav' lecteur qu'il n'est qu'un homme, lui aussi, qu'il est proche de lui ; comme quoi la condescendance paternaliste existe aussi chez les "intellectuels" marxistes... . ). En effet, Machinowski se livre à un petit jeu de mots un peu facile sur "éloigné" : coquetterie de journaliste qui tient tout de même à marquer la distance avec ces ploucs de prolétaires qu'il passe sa vie à "défendre" ; ça mérite bien un petit coup d'encensoir de temps en temps, non ? (Au fait, qu'est-ce qu'elle me disait ma grand-mère déjà ? Ah oui ! j'y suis : "jeux de mains, jeux de vilains ; jeux de mots, jeux de vilots").

"Ce verdict apparaît comme un permis de tuer donné aux policiers et comme une gifle flanquée à des dizaines de milliers de jeunes de banlieue." Oui, c'est exactement ça. On donne le permis de tuer aux policiers. Mais chui pas un imbécile... puisque je lis "L'Huma" ! Alors moi j'ai bien compris ce qu'il a voulu dire, Machinowski : il a voulu dire que ce verdict apparaît comme un permis donné aux policiers bourgeois de tuer les prolétaires ! Voilà ! Nous y sommes ! Plus ça change et plus c'est pareil ! Alors que le seul permis de tuer qui soit démocratique, progressiste et justifié, c'est le permis donné aux prolétaires de tuer les non-prolétaires ! Et la gifle flanquée aux dizaines de milliers de jeunes des banlieues ; ah! comme c'est vrai ! Parce que maintenant ces sales bourgeois, en plus de saigner l'ouvrier à mort, ils sont racistes ! Tous ces jeunes des banlieues, ils peuvent pas les supporter, alors ils ne manquent jamais une occasion de leur donner une belle gifle ! Les ordures ! Ils ont bien raison allez, va ! Ces "jeunes de banlieues", de leur brûler les bagnoles et de violer leurs sales petites mijaurées à ces infects bourgeois ; dommage que je puisse pas en profiter, j'me gênerais pas... j'vas pas pleurer là d'ssus, non ? Au moins, ces jeunes de banlieue, ils sont moins cons que nous, ils font tout haut ce que nous crevions d'envie, tout bas, de faire depuis notre premier cours de marxisme, sans jamais oser passer à l'acte ! putain, juste retour des choses ! et comment qu'il faut en faire venir un max, de ces types, ça c'est des hommes, des vrais ! Y'a qu'avec eux qu'on en finira enfin avec ces sales bourges, on va te leur faire exploser leur putain de société pourrie par l'argent !

"Comment les institutions peuvent-elles être crédibles lorsqu'elles martèlent - à juste titre - l'exigence du respect de la loi mais qu'à l'heure du jugement, la balance est aussi outrageusement faussée ?" Ben oui, quoi ! Ils font des lois pour les bourgeois, par les bourgeois, et ils voudraient qu'on les respecte. Mais les seules lois respectables, ce sont les lois faites par les prolétaires pour les prolétaires et contre les bourgeois. Et les vrais prolétaires, qui c'est en ce moment, hein ? c'est les "jeunes" des banlieues, tiens ! L'acquittement de ce sinistre Hiblot montre qu'il n'y a rien à espérer de cette société-là !

d) Enfin, la conclusion, qui elle, est de nouveau du grand Machinowski, de celui qui allait à coup sûr, pour peu que Brejnev vive un peu plus vieux, devenir le futur ministre de l'intérieur de la défunte URSS... "Vendredi noir que celui de la cour d'assises de Versailles. Susceptible d'alimenter les violences qui éclatent régulièrement lorsque la mort d'un jeune semble s'accompagner de l'impunité pour ceux qui l'ont tué. Menaçant également d'alimenter le discours incendiaire de ceux qui veulent attiser la détresse des grandes cités."

"Vendredi noir" : fine allusion au vendredi noir de Wall Street, en 1929. Histoire de rappeler que le capitalisme n'engendre que misère, malheur, malédiction, régression économique, guerres et oppression... "Susceptible d'alimenter les violences qui éclatent régulièrement lorsque la mort d'un jeune semble s'accompagner de l'impunité pour ceux qui l'ont tué." : ici, l'incitation à ne pas laisser passer ça sans brûler quelques dizaines de voitures (et à l'occasion molester sérieusement quelques bourgeois qui feraient mine de se défendre un peu) est ouverte, franche et massive. Admirez le mot "régulièrement" qui est là pour bien faire comprendre aux "jeunes" que s'ils ne réagissaient pas, ça ne serait pas normal : "comment ? on vous tue un pote comme ça, froidement, d'une balle dans la nuque, et l'assassin est acquitté, et vous ne feriez rien ? mais pourquoi donc ? qu'est-ce qui se passe ? vous flanchez ? vous vous dégonfleriez ? quand même pas, non ? ne me décevez pas ! à "L'Huma", je vous garantis un de ces articles ! que personne n'osera l'ouvrir, que ce soit au errepéherre ou à l'udéeffe ! si vous cassez suffisamment, à l'assemblée nationale, nos députés interpelleront le gouvernement, on désignera les jurés qui ont acquitté Hiblot comme les vrais fauteurs des troubles ! on réussira peut-être à faire annuler le procès ! vous n'allez quand même pas laisser passer une aussi belle occasion, non ? de forcer ce gouvernement à faire enfin une vraie politique de gauche ! pareille chance ne s'était pas présentée depuis Malik Oussekine !

"Menaçant également d'alimenter le discours incendiaire de ceux qui veulent attiser la détresse des grandes cités". La fin de la fin, comme il se doit, est une dénonciation du danger fasciste, toujours le même depuis 1945 (pas depuis le 23 août 1939, non, ça on peut pas, y a trop de connards qui ont fini par diffuser à un public trop important l'histoire du pacte avec Hitler... ) : le danger fasciste ! le discours incendiaire, c'est celui des nervis du FN et du MNR, bon sang c'est bien sûr !"La détresse des grandes cités" : détresse, pour tout excuser, que dis-je pour tout EXPLIQUER (excuser serait reconnaître qu'il y a faute, or il n 'y a pas faute, ceux qui subissent la détresse ne peuvent avoir que des réactions vertueuses et légitimes, ben voyons !). Et "grandes cités" pour souligner le tragique de la situation de ces pauvres jeunes en pleine détresse... grandes comme la misère causée par le capitalisme... grandes comme l'âme de ces pôôôôôvres jeunes... . grandes comme la Révolution socialiste... grandes comme l'Internationale !

CONCLUSION DE L'EXEGESE CI-DESSUS

Après ça, chers lecteurs, il y en a des qui n'ont pas compris le fonctionnement de la pensée socialo-marxiste, c'est franchement qu'ils sont bouchés ! Si après ça, il y en a qui croient que le communisme a changé depuis Staline et la grande époque de la dictature du prolétariat, c'est qu'ils sont encore plus bouchés ! Le socialo-marxisme n'a pas varié d'un iota depuis sa création, par le manifeste de Marx et Engels. Le texte de Machinowski le démontre de manière implacable, hallucinante. Les buts sont les mêmes, le cynisme est le même, les méthodes sont les mêmes et se sont même affinées. Ils n'ont renoncé absolument à rien. Partout où ils gagneraient le pouvoir, ils sécréteraient des clones encore plus cruels, encore plus tortionnaires assassins que Staline, Djerzinski, Béria, Pol Pot, Mao, Caucescu, Giap, Castro... . Ils ont déjà la liste des prochains 100 000 000 de morts qu'ils feront et les plans du prochain archipel du goulag qu'ils nous construiront !

Vous pensez que je dramatise ? Alors relisez encore une fois le présent texte, en réfléchissant bien sur chaque falsification de Machinowski dont je démonte les rouages, puis rapprochez de l'attitude de "L'Huma" pendant toute la durée des exactions de la bande d'assassins du FLN, entre 1954 et l'été 1962 : "l'Huma" a réussi l'exploit sans doute unique, dans toute la presse écrite et parlée de l'époque, de ne JAMAIS relater UN SEUL des épouvantables crimes contre l'humanité commis par cette bande par les attentats à la bombe, les massacres gratuits de civils innocents, femmes, vieillards, enfants égorgés, dépecés, mutilés, désossés à vif, femmes enceintes éventrées, hommes énucléés et amputés du sexe que ces "héros" leur enfonçaient après coup dans la bouche... Le cauchemardesque compte-rendu de l'acquittement du policier Hiblot est strictement de la même veine : les artifices sémantiques sont identiques, les savants brouillards sont identiques, la sournoiserie du langage est identique, la manipulation subliminale du lecteur par les périphrases et les antonomases soigneusement calculées est identique : les "journalistes" de "l'Huma" des années 1954-62 sont interchangeables avec Machinowski, formés à la même sinistre école, rompus au cynisme absolu, à la haine à l'état pur. Car en dépit de ce qu'affectent de croire les beaux esprits depuis la chute du mur de la honte, le projet communiste existe toujours ; c'est un projet à long terme ; il est comme les tréponématoses : quand on le chasse des organes vitaux par des antibiotiques appropriés, il ne meurt pas tout à fait, il essaime des souches dormantes qui vont se tapir au tréfonds de l'organisme, dans les replis dévitalisés du tissu conjonctif cérébral, attendant patiemment son heure, quand l'organisme, trop sûr de lui, baissera la garde de ses défenses immunitaires...

C'est le socialisme-communisme que Charles Baudelaire dépeignait sans le savoir, quand il écrivit son poème "La haine"...

 
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