TestesLibres.net Il faut refaire des hommes libres

Accueil

Actualité du site

G Cazenave

Autres textes

Recherche

Liens

Liste de diffusion

Contact

 

Mise à jour :

 
De l'imprescriptibilité

 

 
Je m'aperçois que malgré tous ses défauts que je ne cesse de dénoncer, notre justice avait instauré un sage principe avec la prescription trentenaire. Tout ce que je viens d'expliquer me fait prendre conscience d'un aspect de la question que j'avais négligé jusqu'ici : la disparition des témoins.

Ne vous méprenez pas, je ne suis pas hostile à l'imprescribilité des CRIMES. D'ailleurs, tout crime, en quelque façon, a un côté imprescriptible. Le mal fait par un crime ne peut jamais être tout à fait réparé. Que le crime contre l'humanité soit EN SOI imprescriptible, d'accord.

Mais l'imprescritibilité des poursuites, c'est ça qui fait problème. C'est trop facile d'attendre que les témoins soient tous morts pour régler des comptes ! Si notre vie était beaucoup plus longue, ou s'il existait des moyens de conservation des preuves du passé infiniment plus performants que ceux dont nous disposons, l'imprescriptibilité des poursuites ne poserait pas de problèmes et pourrait être admise dans certains cas. Mais nous sommes sur Terre, notre vie est courte, les témoins meurent vite, et notre mémoire nous trahit d'autant plus qu'elle est ancienne. Cela donne une prime infiniment trop lourde, une fois les témoins tous morts, à celui qui détient le pouvoir.

Je crois donc que la solution à ce problème, qui a suscité de nombreuses controverses à droite (pour ou contre l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité) passe par une nouvelle manière de l'aborder, en dissociant imprescriptibilité du crime et imprescriptibilité de la sanction. Le crime pourrait être imprescriptible sans que le droit de sanctionner le soit. Il faudrait trouver par quoi remplacer la sanction au-delà du délai de prescrition du droit de sanctionner. Ca paraît difficile, mais je crois que ça vaut la peine d'y réfléchir, ce qui est trop facile est à la portée du premier imbécile venu. On pourrait par exemple imaginer que le droit de conduire un procès subsiste, mettant l'honneur en jeu, mais étant entendu que les peines prononcées ne pourront pas s'appliquer. Ça paraîtra idiot à certains. Pourtant je peux citer un exemple personnel qui montre que non : en 1985, un hippie de mon village m'avait fait une petite saleté (démolition d'une clôture qu'il avait ensuite exposée à la fenêtre de la mairie, tenue à l'époque par ses amis communistes).

J'avais déposé plainte, avec toutes les preuves. A l'époque, la justice marchait encore à peu près. J'avais précisé au procureur que je ne demandais aucun dommage-intérêt pour moi-même, mais que je déposais plainte quand même. L'affaire a suivi son cours, et quelques mois après mon hippie est passé en correctionnelle. Il a été condamné à une amende de 1000 francs et huit jours de prison avec sursis, mais DISPENSE DE PEINE du fait que je ne demandais rien. Ca veut dire qu'on ne lui a pas fait payer son amende et que sa prison avec sursis n'a pas existé effectivement (s'il avait commis un autre délit pendant les huit jours de prison avec sursis, il n'aurait pas dû les accomplir effectivement en plus de la peine qu'il aurait ramassée pour l'autre délit).

Eh bien vous serez peut-être étonnés mais c'est pourtant vrai : vous n'imaginez pas comme cette histoire a calmé mon hippie ! Plus jamais eu d'ennuis avec lui ! Il est même venue me faire des excuses toute honte bue quelques mois après sa condamnation virtuelle !

Ce souvenir me fait penser qu'il y a là une idée à creuser pour renouveler la réflexion sur l'imprescriptibilité de certains crimes.

 
haut de page