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Pétain et la honte

 

 

Je commence par justifier le titre de mon intervention : oui, quand je pense à Pétain, j'ai honte. En tant que Français, j'ai honte de la façon dont ma patrie que j'aime a traité cet homme. Je ne doute pas que l'avenir, quand suffisamment d'épreuves et de malheurs auront ouvert les yeux des Français, le réhabilitera comme il a déjà réhabilité Louis XVI. Le procès de Louis XVI a déjà été maintes et maintes fois refait à la télévision, toujours suivi d'un sondage en direct des téléspectateurs auquel ont répondu des millions de Français, et le résultat est invariable : une ridicule minorité seulement s'était prononcée pour la condamnation à mort de notre dernier Capet de monarchie absolue, le reste se partageant équitablement entre des condamnations modérées (l'exil n'était pas proposé) ou l'acquittement pur et simple.

Le Maréchal Pétain n'a pas eu un procès équitable. Il n'a pas eu droit à une mort digne, puisqu'il n'est sorti de sa prison, âgé de plus de 95 ans (chez la gauche, la chasse aux vieillards, c'est décidément une manie...) qu'agonisant et ne sachant plus où il était.

Les derniers moments du Maréchal sont un crève-coeur qui soulève de dégoût tout homme éduqué selon les principes les plus élémentaires et les plus immémoriaux qui régissent l'espèce humaine depuis qu'elle pense. Le pauvre homme se croyait encore à Verdun. De temps à autre, hagard, il se dressait sur son lit de mort, et il tapait du poing sur sa couverture bientôt linceul, en disant : «Mais nom de Dieu, je les ai pourtant battus, les boches !»

Car toute l'affaire Pétain est une fabrication communiste, un archétype de falsification de l'Histoire. C'est l'exemple même de ce que l'idéologie communiste parvient, à force de mensonges et de manipulations, à fourrer dans la tête des malheureux qu'elle endoctrine (ce qui est plus facile à faire qu'à les tirer de l'ignorance et de la pauvreté... ou de la sottise de se croire cultivé et de le dire, en agitant comiquement la menace de vous envoyer ses diplômes au visage).

Les communistes, en montant le procès Pétain, n'ont eu pour motivation principale que se dédouaner de leur abominable collusion avec les nazis et les Russes staliniens pendant presque deux ans, de fin août 1939 à juin 1941, exactement le temps qu'a duré le pacte germano-soviétique, scrupuleusement respecté par Staline. Staline, qui s'est partagé la Pologne avec Hitler, l'attaquant à l'est à peine Hitler l'avait-il attaquée à l'ouest. Staline, qui a salué par un chaleureux télégramme de félicitations ce qu'il appelait "la magnifique victoire des armées du Reich sur les armées françaises" après la signature du cruel armistice du 18 juin 1940. J'arrête, car on ne présente pas Staline, n'est-ce pas... ni Hitler...

Face à cette trahison des communistes, le radical-socialiste Daladier, sous le gouvernement de Paul Reynaud, a commis la faute d'interdire le PC"F" : c'était une faute, car en ne l'interdisant pas, on l'aurait mis dans une position impossible, un embarras dont il n'aurait pu se tirer. Mais cette faute ne pouvait être évitée, car la trahison communiste - bientôt aggravée par la désertion de son chef à Moscou - avait tellement indigné l'opinion française qu'elle n'aurait pas compris une absence de sanction.

Quand il fut clair qu'Hitler allait être vaincu, les communistes ont tout fait pour investir les divers mouvements de résistance français et se refaire une virginité à l'occasion des indescriptibles désordres qui n'allaient pas manquer d'accompagner le départ des Allemands.

Il fallait à tout prix faire oublier le pacte germano-soviétique et donc inventer des guerres civiles franco-françaises qui remplissent l'actualité et donc détournent l'attention. Les difficultés du ravitaillement, la désorganisation du pays, la misère provoquée par la guerre - la deuxième en moins de 25 ans et la troisième en 70 ans ! Bravo les centristes de gauche qui ont gouverné la France, avec l'aide de leurs complices plus ou moins socialistes, sans partage depuis 1877... -, donnaient aux français bien assez de soucis matériels pour qu'ils soient incapables de réagir collectivement à cette entreprise de subversion de grande envergure.

De Gaulle prit une énorme responsabilité en refusant la main tendue de Pétain à son retour sur les Champs-Elysées : la responsabilité d'une guerre civile franco-française qui dure encore 56 ans après, dont on ne peut entrevoir la fin à vue d'homme, et dont le seul résultat tangible a été dans une première étape la perte de la totalité de notre Empire colonial - principalement au profit des Anglo-saxons - et dans une deuxième étape le lent et inexorable rachat à prix cassés de nos entreprises par les USA (à qui loin de moi l'idée de jeter la pierre, ils auraient bien tort de ne pas saisir les opportunités découlant de nos erreurs!). Et dans une troisième étape, la conséquence lointaine de cette guerre de Cent Ans d'un nouveau genre (civile...) sera de donner à l'Allemagne, sans guerre ouverte, ce que trois terribles guerres n'avaient pu lui obtenir, c'est-à-dire la direction de l'Europe continentale, direction d'abord économique et, d'ici une génération, politique, à n'en pas douter.

Ce sont les communistes qui ont exigé la tête de Pétain, et que le CNL n'a pas eu le pouvoir (ou la volonté ?) de lui refuser. Ils l'ont accusé de haute trahison, lui, le sauveur de la Grande Guerre ! Lui qui n'a jamais pu encadrer ceux qu'il n'a jamais appelés autrement que "les boches''. Ils ont forcé Mornet, qui avait présidé le tribunal du procès de Riom, à présider celui du Maréchal ! Et Mornet ne pouvait mieux avouer qu'il avait obtenu la condamnation à mort sur ordres qu'en disant aux jurés : «Je vais demander la condamnation à mort, mais vous, vous ne devrez pas la voter».

De Gaulle, d'après Peyrefitte (in "C'était de Gaulle''), pour calmer le jeu et réparer ces divisions mortelles qu'il n'avait pu nous épargner, avait l'intention de laisser le vieux Maréchal deux ans en forteresse, puis de le gracier. C'était compter sans la vindicte communiste, à qui ce grand témoin qui savait tout d'eux était insupportable. Dès le lendemain du verdict, l'Humanité, fidèle à ses amours de toujours, titrait à la une en énormes caractères : «LA SENTENCE DOIT ETRE EXECUTEE TOUT DE SUITE». Quand même, ça, le Grand Charles n'a pas osé.

Tôt ou tard, on reconnaîtra que le Maréchal Pétain n'a ni trahi ni déshonoré sa patrie. Il n'a pas commis l'irréparable qu'aurait été un renversement des alliances. Et pourtant, après le lâchage de Dunkerque et Mers-el-Kébir, pas un Français n'aurait protesté s'il avait changé de camp et déclaré la guerre aux Anglais. La vraie collaboration aurait été cela, c'est ainsi que l'entendait Hitler et c'est ce que Pétain n'a jamais voulu.

Les communistes auraient d'ailleurs été les premiers à l'approuver chaudement, et lui auraient certainement tressé des couronnes s'il avait commis cette trahison, eux qui, dans presque tous les numéros de l'Humanité clandestine, appelaient le peuple français à "fraterniser avec les soldats de la Wehrmacht", à manifester "contre la sale guerre capitaliste voulue par les ploutocrates anglais et leurs complices Juifs et Francs-maçons gravitant autour du renégat de Gaulle" : quelques fac-similés de cette édifiante littérature peuvent encore être vus dans les tomes 2 et 3 de la grande oeuvre d'Amouroux "La vie des Français sous l'Occupation". C'est clair, net, sans appel. C'est aussi parce que Pétain ne s'était pas commis avec ces sinistres personnages qu'ils ont réclamé sa tête quatre ans plus tard.

Non seulement Pétain n'a jamais voulu renverser les alliances, mais LE JOUR MEME de la fameuse entrevue de Montoire (qui a sauvé l'Europe de la menace d'une alliance hispano-hitlérienne et d'une invasion de l'AFN, qui aurait rendu impossible le débarquement américain en Algérie), Pétain a dépêché secrètement le professeur Louis Rougier à Londres pour y négocier des accords secrets franco-anglais avec Lord Halifax, accords qui ont été respectés des deux côtés (et qui expliquent le cruel embarras de Churchill avec son de Gaulle sur les bras, embarras qu'à certains moments il ne parvenait pas à dissimuler). A l'un de ses proches qui lui avait demandé, peu après Montoire, ce qu'il entendait par "politique de collaboration avec l'Allemagne'', Pétain répondit simplement : «Rien»

En réalité, Pétain attendait les Américains, comme en 1918. Il a objectivement été un bouclier pour les Français face à l'hitlérisme triomphant.

Même de Gaulle eut ce mot à l'un de ses proches, peu après 58 : «N'avouez jamais que l'armistice était nécessaire».

Les vrais collaborateurs existaient, ils étaient à Paris, autour de Déat, Doriot, Deloncle et d'autres. Jamais Pétain n'a frayé avec eux. Les journaux de Déat tempêtaient tous les jours, dans leurs éditoriaux, contre «Vichy, ce nid de pro-Américains complotant contre l'Allemagne». Weygand, sur ordre de Pétain, a patiemment refait cette armée d'Afrique, qui devait s'illustrer comme on sait dans la campagne d'Italie et sauver l'honneur des armes françaises (un honneur que je ne dénie pas à de Gaulle d'avoir lui aussi sauvé, mais seulement à Bir-Hakeim, authentique page d'héroïsme français).

Avant la mise au caveau de Pétain, en 1952, Weygand a arraché sa propre médaille militaire et l'a jetée dans la fosse. Que quelqu'un ose ici accuser Weygand de complaisance avec les nazis ! Alors si Weygand a eu ce geste, n'est-ce pas, tout est dit...

Pétain, loin de "déporter les Juifs français'', en a sauvé la plupart. Les chiffres incontestables parlent d'eux-mêmes : alors que dans toutes les nations d'Europe dirigées par un gauleiter, les Juifs ont été exterminés à 75 ou 80 % (et même davantage en Hollande), en France, plus de 75% d'entre eux ont échappé au massacre ! Ce qui signifie que si Pétain n'avait pas été là, sans doute un certain nombre d'entre eux qui passent leur temps à le diaboliser, histoire d'attiser les haines franco-françaises auxquelles ils ont l'air de tant tenir, ne seraient peut-être pas là pour cracher sur sa mémoire !

Ce fait est à ce point avéré qu'il a été reconnu à de nombreuses reprises par l'historienne juive Annie Kriegel (notamment in "Ce que j'ai cru comprendre"). Mieux : Jean Borotra, qui fut naguère ministre de de Gaulle mais en même temps président de l'Association de Défense de la Mémoire du maréchal Pétain (il l'a présidée bien avant 1958 et de nombreuses années après...) rappelle, dans la préface du livre de J. Le Groignec "Pétain et les Américains", que Pétain refusa de partir à Alger en novembre 1942, au moment du débarquement des Américains en AFN. Je peux donner quelques précisions peu connues : il n'avait que très peu de temps pour se décider, la fuite avait été organisée par le Dr Ménétrel, dans un petit avion clandestin. Il ne fallait pas traîner car si les Allemands avaient flairé quoi que ce soit, tout allait être fichu. La "fenêtre" où l'aventure pouvait être tentée n'excédait pas deux heures. Le Maréchal n'hésita pas longtemps, et dit à son entourage consterné : «Ce serait bon pour ma gloire, mais j'ai promis aux Français de ne pas les abandonner seuls face aux Allemands, et je tiendrai ma promesse. Si je la reniais, ils subiraient le sort de la Pologne, vous ne pouvez pas savoir ce que c'est que le sort de la Pologne !».

Dans "C'était de Gaulle'', Peyrefitte révèle que de Gaulle lui a dit plus d'une fois : «Si Pétain était allé à Alger en novembre 1942, il aurait été plébiscité et c'était la fin de ma carrière !».

Et Jean Borotra termine sa préface par cette révélation extraordinaire : quelques jours après, l'affaire de ce refus s'étant ébruitée, le grand rabbin de France rendit personnellement visite au Maréchal Pétain, pour le remercier au nom de la communauté juive de France de ne pas être parti en Afrique du Nord !

Jamais Jean Borotra n'a été démenti ! Le livre de Le Groignec est très récent (1996), je ne sache pas qu'il ait été contredit ou censuré !

Cette contribution n'est qu'un minuscule aperçu de tout ce que je pourrais dire sur ces matières.

J'ajoute que l'Association pour la Mémoire du Maréchal Pétain est légale, bien vivante, que la jeunesse des nouveaux membres qui viennent à elle en étonnerait plus d'un, et qu'elle a été présidée par les plus prestigieux héros de la Deuxième Guerre mondiale. Aujourd'hui, elle est présidée par le Général Le Groignec, un héros de la stature de Pierre Clostermann, puisqu'il a descendu à peu près autant d'avions allemands que ce dernier.

Les membres de cette association qui peuvent faire état d'authentiques faits de résistance, c'est-à-dire d'avoir héroïquement combattu contre la Wehrmacht quand c'était dangereux (pas seulement en paroles, non : au moment où les communistes réclamaient la fraternisation du peuple de France avec les valeureux soldats de Hitler !), ne se comptent plus !

L'un de ces glorieux résistants est venu témoigner au procès de Pétain, pour y dire «son écoeurement de voir tous ces politiciens tenter de refiler à un vieillard l'ardoise de leurs erreurs».

Il faudrait scinder le mot "résistant" en deux sous-mots bien distincts. Certains se parent de plumes du paon de résistants (vous vous rappelez la désopilante affaire de Françoise Giroud ?) sans avoir jamais vu un soldat allemand de leur vie. Parmi ceux-là, on en rencontre pas mal qui se sont surtout illustrés par de "hauts faits" contre leurs frères français, quand les Allemands étaient partis, s'entend...

Et il y a les vrais résistants, les Borotra, les Griotteray, les Clostermann, les Le Groignec, les Rémy, les pauvres jeunes du Vercors qui devaient finir piégés comme des lapins, Pétain ayant tenté ce qu'il a pu pour les sauver (voir les détails de cette affaire dans Amouroux).

Pour savoir lequel des deux mots il faut employer à bon escient, ce n'est pas difficile : observez attentivement qui, aujourd'hui, crie le plus fort, qui attise le plus la haine, qui préfèrerait crever que voir enfin les Français s'unir, redevenir une nation unanime. Cet examen vaut mieux que cent mille discours.

Quant aux autres, les vrais collabos, ceux qui méritaient la corde (c'est-à-dire une faible partie de ceux qui ont été sommairement exécutés ou inquiétés en quelque façon en 1945-47), un de nos plus grands écrivains a osé dire la vérité sur eux, et lui non plus n'a pas été censuré, et son éditeur n'a jamais été poursuivi pour cet écrit. Pour en savoir plus sur cette énormité, je renvoie à "D'un château l'autre", où Céline médite devant les belles villas de St-Cloud... et explique au lecteur assidu de quelle espèce sont les AUTRES résistants... Je ne gâcherai pas le plaisir de ceux qui ne savent pas en explicitant davantage...

On me répond :

«Je veux bien admettre que Pétain a peut-être constitué un bouclier pour la France. Maintenant, affirmer que l'armistice était la meilleure solution, je suis beaucoup plus dubitatif. Sans vouloir jouer les "faut qu'on et y'a ka", cet épisode n'est absolument pas un titre de gloire pour notre pays. Cette histoire a été assez pitoyable, et nous en payons encore aujourd'hui un lourd tribut. La grandeur d'un peuple se fait dans la résistance aux épreuves. Force est de constater que sur ce coup-là, notre image et notre grandeur en ont pris un sacré coup.»

Ce qui n'est pas glorieux, c'est d'avoir pris la méchante dérouillée en mai-juin 1940.

Relisez-moi bien : où ai-je dit que l'épisode de Vichy me fait plaisir pour notre patrie ? Je suis Français, j'assume donc notre passé. Depuis que je suis conscient, j'ai cherché à comprendre les raisons de la catastrophe de 14-18, qui m'a pris deux oncles qui dorment à Verdun... L'un d'eux, qui s'était engagé, n'avait même pas dix-huit ans quand ses yeux ont vu le ciel la dernière fois, non loin de Fort Douaumont...

Après bien des lectures et encore plus de témoignages variés et très riches, sans prétendre avoir tout compris, je peux dire aujourd'hui que j'ai compris l'essentiel de ce qui s'est passé. Cela nous écarterait de notre débat, toutefois ce n'est pas le premier blanc-bec venu (fût-il bardé de diplômes et pourvu de nombreux amis dans la Haute Société de Gauche) qui pourrait soutenir un débat avec moi là-dessus.

J'ai aussi très bien compris par quel fatal engrenage de lâchetés et d'abandons français la Première Guerre mondiale a enfanté la Seconde, qui n'en est qu'un prolongement. Brassens a fort bien vu la vérité en écrivant, dans sa chanson aujourd'hui censurée : «Moi mon colon, cell' que j'préfère, c'est la guerre de 14-18...».

Ce que je sais me permet d'affirmer, sans craindre la contradiction dans un débat HONNÊTE ET SÉRIEUX, NON PASSIONNÉ, que Pétain n'est pas responsable du rôle affreux qu'on lui a fait jouer. Il a été littéralement appelé au secours par Paul Reynaud aux abois. Il faut noter que de Gaulle a attendu d'être sûr que Pétain ne l'avait pas repris dans son gouvernement (légal, je le rappelle) avant de s'envoler pour Londres dans l'avion du Général Spears.

Soit dit en passant, je ne suis pas de ceux qui critiquent aveuglément le PREMIER appel de de Gaulle, celui du 18 juin 40 : il respectait le code de l'honneur, n'appelait pas à la division entre Français, n'attaquait pas le gouvernement parfaitement légal présidé par le Maréchal Pétain et où il avait failli rester secrétaire d'Etat à la Guerre. Beaucoup de Français se plaisaient à croire, après cet appel, qu'il y avait connivence secrète entre de Gaulle et Pétain, que de Gaulle était l'épée et Pétain le bouclier. C'est le SECOND appel de de Gaulle qui inaugura la série des appels à la haine et à la division entre Français, il attaquait très injustement le gouvernement de Vichy qui était alors plébiscité par le pays - voir le tome 2 d'Amouroux, au titre suffisamment éloquent : "40 millions de pétainistes".

Les reproches que je pourrais adresser a posteriori au Maréchal sont ceux-ci :

1. A mon avis, il aurait dû garder de Gaulle au gouvernement le 17 juin 40, ou du moins lui en faire la proposition. Ce dernier aurait ainsi été mis au pied du mur. Qui sait ? Peut-être en serait-il sorti quelque chose de bon ?

2. Il aurait dû établir le gouvernement légal de Vichy à Paris et non rester à Vichy. Les Allemands le lui avaient proposé. Cela nous aurait peut-être évité les excès difficiles à avaler de la VRAIE collaboration, celle de Paris (exemple de passage édifiant d'un article de Déat dans "L'Oeuvre", qui tirait alors jusqu'à 300 000 exemplaires : «La France est une nation femelle qui ne peut être pleinement elle-même que fécondée par le mâle allemand». Je n'approuve pas l'exécution de Brasillach, mais lui aussi en a écrit de cette veine, et ce n'est pas à son honneur, non vraiment merci bien...).

3. Après avoir tourné et retourné la question dans ma tête, car elle n'est pas simple, je pense que malgré tout, Pétain aurait dû partir à Alger en novembre 42. Au moment où il le pouvait, nous avions encore notre flotte intacte à Toulon, et compte tenu que les Américains venaient de débarquer en AFN, cette flotte redoutable, multipliée par la puissance américaine, aurait pu faire réfléchir Hitler, qui était en train de se faire découper au hachoir à Stalingrad, et donc nous éviter le «sort de la Pologne» que Pétain craignait tant pour nous.

Bien sûr, je dis tout ça après coup, après y avoir réfléchi tranquillement des centaines de fois, après mille lectures... S'il m'avait fallu trancher ce dilemme sur l'heure, aurais-je fait mieux ? Tant il est vrai que ce n'est pas de faire son devoir qui est difficile mais de savoir quel est ce devoir !

Il fut un temps où j'aurais ajouté à ces reproches celui, pour Pétain, d'avoir accepté de devenir le chef du dernier gouvernement de la Troisième République, le 17 juin 1940. Mais pouvait-il refuser sans s'attirer le reproche amer de tout un peuple qui le réclamait comme son ultime sauveur au moment d'une détresse inouïe ?

C'est sûr, il aurait mieux fait de conserver son ambassade à Madrid, sa gloire serait restée intacte dans les dictionnaires...Il pouvait arguer de son âge... Ce serait méconnaître l'ampleur de la vague populaire qui l'a porté au pouvoir en ces heures tragiques, une vague contre laquelle ni lui ni personne ne pouvait rien.

Ah ! Certes non, je ne puis pas penser à cette période sans avoir le coeur serré et la rage au coeur. Toutefois, je ne me contente pas de déplorer et je ne me lamente pas. Il y a des responsabilités, très lourdes, et que maintenant, je connais. Je puis tranquillement affirmer que la diabolisation de Pétain est entre autres un dérivatif commode pour ne jamais parler de ces responsabilités. L'hypocrite cinéma actuel sur Vichy sert aussi à cela...

Mitterrand, malgré tous ses défauts et toutes ses erreurs catastrophiques, sur cette question-là, ne s'en est jamais laissé conter par quiconque. Il ne craignait personne.

Le spectacle qui m'a le plus écoeuré, c'est de voir, à la fin de sa vie, quand il était cloué dans un lit à l'Élysée pendant les Conseils des Ministres de Balladur, tous ceux que Mitterrand avait comblés d'honneurs et de largesses faire soudain semblant de découvrir son passé, que bien sûr ils connaissaient depuis au moins trente ans, ces vieux renards ! Et de surenchérir les uns sur les autres pour sonner l'hallali du vieux conducatore sozialista malade et au bout du rouleau. Pour se placer assez tôt auprès des nouveaux maîtres présumés ? Jamais spectacle de rats fuyant un navire et salissant son capitaine devant qui ils rampaient une heure avant encore ne m'a autant donné la nausée...

Mitterrand aura donc été grand une fois dans sa vie, à ce moment-là, quand il a résisté jusqu'au bout malgré la tenaille implacable et les souffrances démentielles que lui infligeait la maladie. Il y fallait du courage, eh bien là il en a eu. Il a même été admirable devant Elkabbach, quand il lui répliqua, le visage ravagé de souffrance maîtrisée : «Mais que voulez-vous de plus ?».

Et jamais il n'a accepté que la France soit moralement condamnée pour la terrible période de Vichy. Cette attitude le rachète d'une grande partie du mal qu'il a pu faire par ailleurs.

N.B. L'armistice du 18 juin 40 n'était pas "la meilleure solution", c'était LA SEULE solution. Aucun historien sérieux ne se hasarderait à le nier, il se déconsidérerait devant ses collègues, du moins ceux pour qui l'Histoire est une science aussi exigeante que toute autre.

 
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